Louis Joullié sème des couverts végétaux depuis 3 ans : une expérience inédite dans cette exploitation familiale où cohabitent deux générations d’agriculteurs.
Si vous roulez au hasard des petites départementales du coeur du Gers, vous apercevrez peut-être dans les champs l’ombre de Louis slalomer entre des rangées de radis chinois, inspecter des plants de moutarde d’Abyssinie, contempler la beauté de la phacélie en pleine floraison. “L’autre jour ma parcelle était tapissée de ces fleurs bleues, c’était beau ! Des touristes se sont même arrêtés pour me demander d’où elles venaient.”
Louis Joullié a 31 ans, il a le pas lent et la carrure d’un rugbyman, et l’affection qu’il porte à ces fleurs bleues ne relève ni de l’esthétisme ni de la mièvrerie. Ces couverts végétaux sont non seulement une réussite agronomique mais une petite révolution sur cette exploitation familiale. Louis et son frère se sont successivement associés à leur père en 2012 puis 2015, pour la gestion de leurs 300 hectares de céréales, dont ils auront bientôt l’entière responsabilité. Le recours à cette technique de conservation des sols est une première sur leurs terres, et reste marginal dans la région. Louis se sait observé :
« On est en train de modifier les techniques culturales de notre père donc je veille au retour sur chaque nouvel investissement. Je veux travailler au plus juste et ne pas impacter notre bénéfice final. »
Niché entre ses radis et sa moutarde il y a donc un défi, immense: celui de prendre une relève sur des terres familiales, d’y assurer la continuité tout en y injectant les innovations nécessaires à une agriculture de plus en plus raisonnée, sans dynamiter les acquis. Cela tombe bien car Louis n’aime pas dire “je”, il préfère dire “nous”. Sur son polo comme sur sa parka trône le logo de l’unique coop avec laquelle sa famille et lui travaillent, en toute confiance, depuis des années. Ses réflexions sur le métier, il les partage volontiers avec sa famille et ses amis, loin de l’agitation des sites web spécialisés. Il a le goût du temps long et le souci du travail bien fait, de l’accomplissement.
« Je me donne du mal, je peux passer des années à travailler sur un assolement donc quand je perds de l’argent à cause des prix volatiles, c’est raide pour le moral. »
Petit à petit, Louis et son frère s’équipent donc de nouveaux outils qui leur permettent de faire face à cette nouvelle donne, de “valider et de s’approprier la technique paternelle” mais aussi, parfois, “de se libérer des a priori” pour travailler différemment et optimiser la rentabilité. Avec la patience et l’agilité de ceux qui marchent sur des oeufs. Ou sur des fleurs bleues.
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